Lettre à des amis perdus
Vous étiez
là je vous tenais
Comme un miroir entre mes mains
La
vague et le soleil de juin
Ont englouti votre visage
Chaque
jour je vous ai écrit
Je vous ai fait porter mes pages
Par
des ramiers par des enfants
Mais aucun d'eux n'est revenu
Je
continue à vous écrire
Tous le mois d'août
s'est bien passé
Malgré les obus et les roses
Et
j'ai traduit diverses choses
En langue bleue que vous
savez
Maintenant j'ai peur de l'automne
Et des soirées
d'hiver sans vous
Viendrez-vous pas au rendez-vous
Que cet ami
perdu vous donne
En son pays du temps des loups
Venez donc
car je vous appelle
Avec tous les mots d'autrefois
Sous mon
épaule il fait bien froid
Et j'ai des trous noirs dans les
ailes.
René Guy Cadou, Pleine poitrine.